mardi 12 juin 2012

Guyane : un salut pour la famille


Iles du salut et vue sur l'Ile du Diable en Guyane
Ile du Diable - archipel des Iles du Salut - Guyane

Les Iles du Salut

Dominique est, pour la journée mon accompagnatrice. Son fils ne viendra pas, une ancienne expérience maritime lui indique qu’il sera bien mieux chez lui, devant son ordinateur. Pour la mère, ça ne pose de pas de problème, L’occasion de s’évader est bien trop attirante pour la manquer. Nous partons de Cayenne à 7h00. Il nous faut rouler jusqu’à l’embarcadère de Kourou. J’ai hâte d’y être. Pour ce cou, j’ai décidé de me faire plaisir. Nous partirons sur les Iles par catamaran. 

Le départ se fait depuis le Kourou. Nous devons dépasser le delta pour déboucher sur l’océan Atlantique. Le bateau est immense. Tout de blanc, il est spécialement conçu pour des transports touristiques. Il y a plusieurs tables, des bancs et les inévitables filets en suspension. Tout l’équipage semble fatigué. Les uns se prélassent sur les tables tandis que d’autres tentent une approche timide et modérée des filets. Peut-on marcher dessus ? Risque t-on de passer à travers ? Est-ce autorisé par le capitaine de bord ? allons-nous nous mouiller ? Tant de questions qui se terminent par les actes d’un aventurier des temps moderne. Fini le doute ! Hop, tout le monde se gette dessus comme des enfants qui découvrent pour la première fois, la sensation de faire du trampoline.

Guyane française de la côte vers Kourou
Paysage marin au large de la Guyane
Filets du super Katamaran des Iles du Salut
Filets de Katamaran

La sortie du fleuve nous laisse apercevoir des pêcheurs à la pose de leurs filets. Ils sont sur leur pirogue. Il m’est impossible de déterminer avec précision de quelle ethnie il s’agit. La lumière crée une situation féerique digne d’un cliché de grand photographe. Les rayons du soleil sont rasants et les personnages apparaissent en contre jour. Ainsi nous avons le plaisir d’observer des ombres chinoises.  L’eau étincelle de milles paillette argentées.

Pecheurs guyanais non loin de Kourou
Pêcheurs Guyanais


Il n’y a pas grand monde sur les flots. Juste un Zodiac de grande taille qui nous dépasse et fracasse les écumes et les vagues. Je ne pense pas que les passagers doivent être à l’aise. À mon sens, la force des frappes sur les vagues doit ébranler le confort des occupants. Je pense que l’exercice doit être amusant pendant quelques minutes, mais le supporter tout le long de la traverser doit relever du calvaire. 

Nous passons une balise, puis deux. Une heure et demie après nous sommes en vue des Iles. L’environnement change radicalement des côtes continentales. L’eau est vert émeraude, et dans certains lieux, d’un bleu turquoise à rendre jalouses les Antillaises. C’est un véritable choque pour moi. Depuis toujours les côtes de la Guyane et ses environs m’ont été conter comme  surchargées de boue et d’alluvion, charriés par les embouchures fluviales. Et bien la rumeur est donc partielle, la Guyane possède ainsi toutes les facettes d’une province paradisiaque. Chance pour nous de faire partie des rares à connaître la vérité. 

Une maison se dévoile. Puis des cocotiers se démêlent du tumulte verdoyant. Bientôt nous apercevrons le ponton d’accostage. Il était temps. Je commençais à languir la terre ferme. Je n’ai pas le mal de mer, mais rester sur un voilier, sans s’occuper des manœuvres, enlève beaucoup de charme à l’expérience. Je pense qu’à cet instant se révèle mon côté impatient.

Nous amarrons sur la première Ile. Il y en à trois : La Royale, la St Louis et celle du Diable. Le tout forme les Iles du Salut. Quelques années en arrière nous apprendrions que ces lieux étaient une des plus importante station touristique du pays. Seuls des privilégiés pouvaient s’y rendre. C’était l’élite de la France que l’on choisissait pour avoir le privilège de profiter de ce paysage et de ses plages. Je plaisante bien sur.  Comme beaucoup de personnes ne l’ignore, la Guyane à été la terre d’exile des forçats que l’on ne voulait surtout pas garder sur le territoire National. Ils ne méritaient pas de vivre et la politique de l’époque était d’éradiquer toute délinquance par la déportation. Comme s’il y avait des quotas de malfaisants et que de les chasser ferait réduire la misère locale… Ainsi beaucoup d’hommes, fautifs de peu de choses, ont été traité d’un châtiment sévère, voir criminel dans certains cas. Mais nous ne referons pas l’histoire, c’est certain. 

Tunnel de végétation sur le chemin du cimetière
Tunnel de végétation
Dominique et moi commençons notre évolution sur la piste principale. L’île n’est pas grande. Je pense que ça doit être très dur de se perdre sur ce territoire. Mais sait-on jamais, tant que je n’aurais pas fait le tour complet… Le nombre de pistes est restreint, il doit y en avoir au maximum 4 ; Ce qui en effet limite les risques. L’une d’elles nous mène sur les hauteurs. En fait l’île est une sorte de petite colline, un monticule peut-être. En haut, nous découvrons en premier un muséum sur les bagnes. De mémoire, il doit s’agir de l’ancienne commanderie. Le bâtiment est en position stratégique et idéale. Du fait qu’il surplombe le port et qu’il est suffisamment haut pour voir ce qui arrive au large et surtout parce que la vue sur la terrasse est imprenable. À l’intérieur, une employée du CNES, accueil les visiteurs. Elle est la responsable des lieux. Il y a des panneaux, des gravures, des photos, et beaucoup de texte, de lettres officielles. Par mis tous ces documents il y a ceux qui sont relatifs à l’affaire Dreyfus. Grâce à ces témoignages, nous pouvons découvrir l’article « J’accuse ». Article d’un journaliste qui à crue en la parole du condamné Dreyfus et qui à bravé l’autorité en accusant et défiant l’administration de l’époque. L’histoire de Dreyfus est sombre. D’abord condamné pour haute trahison, il fut extradé vers l’Ile du DIABLE, puis relâché 5 ans plus tard. Mais ce que peu de gens savent est qu’il fut tenu en silence pendant tout sont internements. Qu’il était le seul à vivre sur son Ile hostile. Les messages et les vivres lui étaient transmis par le biais d’un téléférique manuel en partance de l’Ile Royale. Ses seuls compagnons étaient deux gardes postés à l’entré de sa cabane. Ces hommes avaient pour mission de veiller sur le détenu, ils n’avaient pas le droit d’avoir de contact avec le convive et surtout ils devaient empêcher tout contact avec l’extérieur. Aussi incroyable soit-il car l’ordre était d’abattre le détenu si tout navire ou embarcation inconnue accostait sur le rivage. 5 ans plus tard, le peuple apprend que M. Dreyfus sera relâché. Il apprend surtout que cet homme était innocent et qu’il avait fait le fruit de préjugés raciaux, d’une enquête bâclée et de machination politique. Quelle histoire de fou, quelle époque de malade ! 

Tombe des officiers de l'Ile
Tombes aux Iles du Salut
Tombes avec vue sur l'océan
Pierres tombales
Reste d'un bâtiment d'arrêt
Bâtiment d'incarcération

Cette histoire ne me laisse pas insensible car mon histoire familiale à lourd à porter de cette époque et surtout de cet événement. Ce qui est d’autant plus étrange est ce besoin de me rendre en ces lieux, de retourner sur tous les sites en lien étroit avec l’histoire de ma famille, de mon histoire. Ce n’est donc pas sans émotions, que je découvre cette terre et ces reportages historique.  

Sur cette Ile, les bagnards n’étaient pas sûr de revenir vivant. Avec des conditions de vie sommaires, ils devaient purger leur peine tout en sachant que les maladies, les meurtres, les règlements de comptes ou la pendaison auraient raisons d’eux avant qu’ils en sortent. On raconte que la vie des insulaires était plus douce que celle du continent. Le travail était moins dur et les occasions de se divertir plus grande ou plus fréquente. Il y a une coquetterie sur les bords de l’île. Pour que les hommes puissent se laver, une piscine faite de pierre a été construite sur la plage. Cette piscine existe encore de nos jours et fait le bonheur des visiteurs. Je reste ému par l’évolution de cet endroit. Aujourd’hui, je foule la terre interdite de ceux qui sont morts pour leurs fautes il y a de ça bien des lunes.  Que penseraient tous ces hommes s’ils savaient que ce qu’ils avaient pour lieu de pénitence servirait à égailler les touristes des époques modernes. Je trouve ça presque glauque de pouvoir venir sur ces plages pour se baigner, alors que d’autres y sont morts sous le poids de leur peine. 

Sur la route du plateau
Haut de l'Ile
Nous continuons notre épopée touristique vers le sommet de l’île. Nous arrivons sur un plateau. Une fois de plus, la vue me laisse rêveur : l’eau, le bleu, la côte continentale, les bateaux, les bananiers et cocotiers. Je suis dans un rêve dont je ne veux plus jamais sortir ! 
Je reviens à moi après quelques poses photos. Le plateau est construit. Il y a plusieurs baraquements. Le premier est le plus grand et le plus massif. Il ressemble à une grande maison coloniale, en dur. Je ne sais pas quel était son utilité de l’époque, mais aujourd’hui elle sert de restaurant pour les touristes. Sur la gauche, il y a un poulailler et plusieurs bêtes domestiques. Par mis elles, se faufile un agouti, gros rongeur noir marron, un peu difforme. C’est le premier que j’aperçois depuis mon arrivé en Guyane.  Il n’est pas farouche, il reste devant moi et observe mes mouvements. Il reste là pendant un instant, puis décide de se diriger vers les racines grimpantes d’un arbre gigantesque non loin devant nous. 

Plusieurs personnes se dirigent derrière le restaurant. Il semble s’y dérouler un fait important… Il me semble entendre qu’un caïman loge à cet endroit. Je suis curieux de voir cet animal et me presse vers la foule. Un muret me barre la route. C’est une fausse de plusieurs mètres de profondeur. Je suis déçu. Le caïman ressemble plutôt à un iguane ; à plusieurs iguanes ! Ils sont  là, au soleil, statiques, la gueule en l’air, affichant un dédain affligent pour les touristes. Leurs couleurs sont vives, il y a du gris, du jaune et du vert. Ils ont des crêtes sur toute la partie supérieure du corps et ressemblent ainsi à de valeureux combattants.  

Iguanes au repos et bain de soleil
Locataires de l'Ile
Nous n’allons pas rester longtemps sur ces hauteurs. Il fait très chaud. Le sol rouge accentue notre cuisson et l’air s’appauvrit. Il est grand temps de faire le tour de l’île et de se mettre à l’abri. Il y a un cimetière derrière l’île. Ses occupants sont choyés. Ce sont les gardes morts pendant leur exercice.  Le cimetière est paisible, il est caché entre les arbres et borde la plage. La lumière semble éclairer la scène d’un spectacle, théâtre de la vie de l’île, dernier lieu de rendez-vous pour ses plus fidèles acteurs. En ce lieu, l’océan berce les dormeurs du  bruit des vagues. Les fantômes d’une autre époque peuvent dormir en paie devant l’immensité et la sérénité du paysage. Les bagnards n’ont pas le droit de cité. Eux étaient livrés à la mer, aux requins. Ce qui d’ailleurs contribua à la réputation des îles. Aujourd’hui les requins se font rares, les cadavres aussi ! Je serais bien resté pour méditer encore… Je n’ai plus le temps. Le bateau va arriver. Nous avons rendez-vous pour accoster l’île St Louis.  

Vue sur le débarcadaire
Zone de mouillage de l'Ile

5 minutes plus tard, nous étions échoué sur un nouveau territoire. Le lieu est plus rude, plus sauvage, plus étrange. Ici aussi il n’y a pas de nombreux chemins. Mais je ne m’amuserais pas à divaguer en dehors des sentiers ! Cette île est encore occupée par l’armée. Tout une partie leur est consacrée. Le reste est composé de forêt est de vestiges du bagne. De loin, il est impossible d’apercevoir les anciennes constructions. 

Un escalier monte sur le haut de la colline. Il me fait penser aux histoires de cités perdues. Fabriquée de grosses pierres, la végétation l’envahit de toute part, laissa juste ce qu’il faut de place pour y poser ses pieds. Attention, qu’allons-nous trouver plus haut ? Qu’est ce qui pourrait être si important pour être gardé de la sorte ? Le chemin est sombre. Nous évoluons sous la forêt. Alors que mon regard s’arrête sur le tronc d’un arbre immense, je ne saisit pas tout de suite la situation. Ce n’est qu’après que je comprends ; nous sommes sur les ruines du bagne! Il y a un grand mur, puis une porte basse. Jusque-là, d’innombrables feuilles jonchent le sol. À tel point que nos pieds disparaissent dessous. Puis-je vraiment risquer de m’aventurer vers les ruines. Je me rendis compte de ma stupidité lorsque Dominique prit les devants et marcha sans même regarder ses pieds, sans même m’attendre. Quelle leçon !

L’intérieur est subjuguant par sa force. À peine entré que l’imaginaire se met en place. Je vois les bagnards passants d’une pièce à l’autre, Je vois les gardes aux portes, guettant les gestes de ceux pour qui ils ont la charge. Il n’y a plus de toits, que des murs, des plantes et des arbres. Ce qui est étrange est que l’on croirait qu’il y en ai (des toits) ! La végétation est tellement dense que le soleil passe à peine ! Dominique me cherche. « Jérémy, il faut que tu viennes voir ! » S’écria t-elle. En effet, la chose était à voir ! Au milieu d’une allé, un arbre plus que centenaire avait pris possession de l’espace et des murs. Il règne là en roi. Tel une pieuvre, se racines se répandent tout du long des remparts. L’arbre nous regarde de haut. Il est maître et nous ses serviteurs… À cet instant je me rappela tous les reportages que j’ai pu voir sur la Guyane et sur les bagnes. Je compris surtout que tout ce que j’avais retenu se trouva devant moi, faisant l’effet d’un flash, d’un travelling arrière. Deux minutes plus tard nous courrions vers le port pour ne pas louper notre départ. La transition fut déchirante, mais nécessaire !


Ancien bâtiment d'arrêt
Bâtiments d'arrêts des Iles du Salut
Visite du bagne de l'Ile

Jeune pouce à travers les murs
Vestiges du bagne des Iles du Salut

Sur l’Océan, alors que nous traçons la route avec deux autres catamarans sur nos flans, le soleil nous talonne. Le vent nous apporte la nouvelle. Il fait froid, Il va bientôt faire nuit. Dominique et moi prenons le temps de nous installer sur les filets. La mer est haute et deux minutes plus tard nous finissons tous deux trempés. Quelle rigolade ce fut ! Je prends plaisir à me remémorer les instants merveilleux de cette journée. Je me dis que ça doit continuer, que le rêve et le bonheur de l’instant doit rester. Un seul souci me vient : regarder encore une fois tout cet environnement et ne pas louper le moindre détail, la moindre singularité. Je veux me souvenir !
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